DAKAR (Reuters) - Senegalese novelist and film director Ousmane Sembene died at home overnight aged 84, state radio in the west African country reported on Sunday.
The son of a fisherman from Senegal's southern Casamance province, Sembene wrote several novels on social themes inspired by his experiences serving in the French army in World War Two, as a railroad worker in West Africa and as a docker in France.
Sembene also made "La Noire de..." (Black Girl), credited as being the first feature film directed by a black sub-Saharan African director. Sembene won France's Jean Vigo film prize in 1966.
The film tells the story of a Senegalese nanny working for a wealthy French couple in Senegal's capital Dakar who moves with the family back to France only to have her hopes of a new life dashed.
<http://www.ouestaf.com/Sembene-Ousmane,-le-dernier-clap-d-un-pionnier-du-cinema-africain_a500.html> <http://fr.allafrica.com/stories/200706100118.html> Mort de Sembene Ousmane, le dernier clap d'un pionnier du cinéma africain
Ouestaf.com (Dakar) ACTUALITÉS 10 Juin 2007 Publié sur le web le 10 Juin 2007
Le cinéaste et écrivain sénégalais Sembene Ousmane, décédé samedi soir à Dakar à l'âge de 84 ans, était le prototype de l'homme d'action, de l'artiste engagé dans les combats essentiels de son temps, pour la justice, la liberté et la dignité des peuples africains.
"Il y a des combats que l'on mène pas à pas, jour après jour", aimait-il à dire aux journalistes qui parvenaient à lui arracher des mots, tant l'homme était avare en paroles. Il préférait l'action et en cela, il a fait preuve, tout au long de sa carrière, d'un courage et d'une ténacité sans pareille.
En témoin de son temps, il a mené sa part de combat, ne perdant jamais sa capacité d'indignation autant dans ses Å"uvres que dans ses interventions. Et quand on lui reprochait ce franc-parler souvent cru, il répondait : "ce n'est pas un défaut, c'est ma liberté". Libre, Sembene l'a été jusqu'au bout.
"J'ai bavé, je baverai encore mais avec dignité. Je ne me mettrai jamais à genoux", disait-il en 2003 dans un reportage du journaliste burkinabé Yacouba Traoré. "J'ai un travail que j'aime et personne ne m'a demandé de le faire. Je veux parler avec mon peuple et cela je ne peux pas le faire en cachette", ajoutait l'homme. Autant, il y avait la liberté dans son choix de faire du cinéma son métier pour "parler à (son) peuple", autant il a usé de cette liberté dans ces Å"uvres littéraires comme cinématographiques.
Sembene, Ousmane de son prénom, est né le 1-er janvier 1923 à Ziguinchor. Son père ne le déclare que huit jours plus tard.
Très tôt, il est confié à un de ses oncles, instituteur. Mais il ne fera pas d'études. A 13 ans, en 1937, en pleine époque coloniale, il gifle le directeur de son école qui voulait lui apprendre le corse. Renvoyé, il doit se débrouiller pour survivre. Il devient pêcheur, mécanicien, maçon pour finir militaire. Il est mobilisé dans l'armée coloniale en 1942. Il est envoyé au Niger, au Tchad, en Afrique du Nord, puis en Allemagne.
Démobilisé, il participe en 1947 à la grève des cheminots, la première en Afrique, dont il tire un de ses premiers romans : "Le bouts de bois de Dieu", publié en 1960.
En 1948, Sembene a 25 ans. Sans travail et pratiquement sans instruction, il décide de partir en France. Il s'embraque clandestinement dans un bateau pour Marseille. Il s'instruit, milite au Parti communiste français en 1950, puis à la Confédération générale des travailleurs (Cgt). La France est alors en guerre au Vietnam Avec ses collègues, il bloque le port de Marseille pendant trois mois pour empêcher l'embarquement d'armes destinées à l'Indochine.
Devenu responsable syndical, il rencontre des écrivains de passage à Paris pour le premier Congrès des écrivains et artistes noirs et se met à écrire. L'autodidacte qu'il est, se lance dans le roman. Ça donne "Le docker noir" (1956). Il publie aussi "Ã" pays, mon beau peuple" (1957), "Voltaïque" (1962), "L'Harmattan" (1964), "Le Mandat" (1965), "Xala" (1973), "Le Dernier de l'Empire" (1981), "Niiwam", suivi de "Taaw" (1987).
Mais après la sortie de ses premiers livres, il commence à s'intéresser au cinéma, réfléchit à une démarche plus grand public, "politique, polémique et populaire" comme il disait. Conscient qu'il était de la portée limitée des livres dans une Afrique encore en proie à l'analphabétisme.
Avec ce projet en tête, il monte à Paris, à 38 ans, avec l'idée de s'inscrire dans une école de cinéma. Il n'y trouve aucun soutien de la part des intellectuels engagés. C'est alors à Moscou, au studio Gorki, avec Marc Donskoï et Serguei Guerassimov, qu'il apprend à tenir une caméra.
Dans ses films, Sembene s'immerge dans les quartiers populaires. Il connaît tout le monde, organise des projections aux prisonniers, parle de culture aux enfants A 40 ans (1963), il réalise son premier court métrage : "Borom Sarrett". Il y dépeint avec humour la journée d'un transporteur qui véhicule clients et marchandises. Il réalise en 1963 le documentaire "L'Empire Songhay".
En 1964, il réalise son deuxième court métrage, "Niaye", primé l'année suivante au Festival de Locarno. Ce film raconte l'histoire d'un chef de village qui a fait un enfant à la fille du griot.
Estimant que le cinéma doit devenir "le cours du soir du public africain", il se lance dans son premier long - en réalité un moyen métrage - "La Noire de..." (1966) qui est l'histoire d'une jeune Sénégalaise que ses patrons blancs amènent avec eux en France. La jeune fille ne supporte pas les humiliations, le paternalisme, l'exil. Elle se suicide, préférant la mort à l'esclavage.
Ce film obtient le Prix Jean Vigo, le "Tanit d'or" aux Journées cinématographiques de Carthage (1966), le prix de meilleur réalisateur africain au Festival mondial des Arts nègres tenu la même année à Dakar.
Sembene Ousmane réalise son deuxième long métrage en 1968. C'est "Le Mandat", dans lequel le rôle principal est merveilleusement tenu par Makhourédia Guèye. Le cinéaste y offre une saisissante peinture de la société sénégalaise postindépendance, où tout le monde vole, est voleur et où le peuple est exploité par des Noirs dit "modernes".
Animé du souci d'être un témoin de son temps, il se penche en 1971 sur la seconde Guerre mondiale qu'il a lui-même vécue, en réalisant "Emitaï". Dans ce long métrage, une partie des hommes d'un village diola de Casamance a été enrôlée de force pour se battre dans l'armée française. Ce sont les femmes qui récoltent le riz, dont un colonel de l'armée coloniale veut prélever la plus grande partie. Il va se heurter à leur résistance.
Trois ans après ce film, il se remet en 1974 à la description de la nouvelle société moderne sénégalaise amorcée avec "Le Mandat". "Xala" est un réquisitoire. Sembene y dénonce l'attitude d'une bourgeoisie noire qui imite tous les défauts des Blancs (corruption, arrogance et défaut de scrupule).
Le riche homme d'affaires, Abdel Kader Bèye, a décidé de prendre une troisième épouse. Mais le soir du mariage, impossible de consommer l'union. Bèye est impuissant. Lui, le moderne, va se tourner vers la tradition dont il s'était affranchi et senti libéré. "Xala" est un procès des nouveaux dirigeants africains qui se sont arrogés tous les pouvoirs.
En 1977, Sembene réalise "Ceddo". Ce film porte sur la résistance d'une communauté africaine à l'avancée de l'islam au 17-ème siècle. A cette occasion, Sembene a le commentaire suivant : "on peut faire autre chose que de regarder vers l'Arabie Saoudite ou vers l'Occident. On peut regarder vers l'intérieur de l'Afrique, sa culture, sa spiritualité".
Ce film est interdit au Sénégal par le président Léopold Sédar Senghor qui estimait qu'il y avait une "faute" d'orthographe dans la transcription du titre. Pour Senghor, le terme ceddo ne devait s'écrire qu'avec un seul « d ». L'Å"uvre attaque les invasions du catholicisme et de l'islam en Afrique de l'Ouest, le rôle de ces religions dans la destruction des tissus sociaux traditionnels.
Infatigable, jeune dans ses idées et toujours sur la brèche, "l'aîné des anciens" comme il aimait à se faire appeler revient à la seconde Guerre mondiale. Il réalise en 1988 avec Thierno Faty Sow "Camp de Thiaroye".
Sembene dénonce l'injustice faite aux tirailleurs qui, après avoir libéré la France de l'occupation nazie, se retrouvent démobilisés, sans décoration, ni reconnaissance. Et leur solde cristallisée par le général De Gaulle. Parce qu'il fustigeait l'attitude du pouvoir français, le film n'est pas autorisé à Cannes. Malgré tout, "Camp de Thiaroye" reçoit le prix spécial du jury au Festival de Venise (Italie).
Dans "Guelwaar" (1992), où le rôle principal est tenu par Thierno Ndiaye Doss, il s'en prend à l'aide internationale qui cache à ses yeux une exploitation des richesses des pays du Sud par l'Occident. Ainsi, Sembene espérait l'émergence d'une nouvelle Afrique qui refuse de tendre la main et de mendier.
Toujours animé de la volonté de marquer son temps, de faire réfléchir et de tenter de faire évoluer des situations archaïques, il se lance, à la fin des années 90, dans la réalisation d'une trilogie sur ce qu'il appelait "l'héroïsme au quotidien".
Le premier film de cette série est "Faat Kiné", réalisé en 2000. Le deuxième, "Moolaadé", aborde le thème sensible de l'excision. Mais pour le cinéaste, c'est une Å"uvre qui défend la liberté d'expression. Celle de femmes ayant décidé de s'opposer à une tradition qu'elles jugent archaïque. "La Confrérie des Rats", le troisième de la série, était en préparation.
Sembène a reçu plusieurs récompenses pour "Moolaadé" : prix du meilleur film étranger décerné par la critique américaine, prix Un Certain Regard à Cannes, prix spécial du jury au Festival international de Marrakech. Auparavant, il avait reçu, entre autres distinctions, le prix Harvard Film Archive décerné par l'Université Harvard de Boston en 2001.
La camera de Sembene ne tournera donc pas "Samory", l'Å"uvre à laquelle il tenait, pour rendre hommage au résistant à la pénétration coloniale. Philosophe devant les difficultés rencontrées pour réaliser ce film, il disait : "si je ne fais pas +Samory+, d'autres le feront".
Il ajoutait : "on essaie de le faire mais il y a des priorités. Quand je pense aux souffrances que je peux avoir pour faire un film, quand je pense à nos hôpitaux, nos écoles, nos dispensaires, je dis que ce n'est pas un problème". C'était ça Sembene. Libre et sensible aux préoccupations de son peuple.
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